
Depuis des temps immémoriaux, deux écoles s’affrontent : celle du gameplay et celle de la narration. Après avoir mûri pendant six épisodes, Final Fantasy semblait avoir fait son choix : les mécaniques de jeu doivent ici servir le propos et les personnages, et non l’inverse. Bien que licence du renouveau par excellence, Final Fantasy semblait avec son treizième opus s’être enfermée dans sa propre routine qui, peu soucieuse du gameplay, menait au film d’animation de soixante-dix heures. Dans ces conditions, et en ayant pris au passage dix ans dans la gueule, difficile de croire en FFXV, rebooté trop de fois par des développeurs semblant plus occupés à modéliser des cailloux qu’à concevoir un jeu. À vrai dire, le titre, s’il semble encore attendu, l’est probablement pour les mauvaises raisons, la naïveté ayant avec l’attente cédé sa place au cynisme. Trop onéreux, Final Fantasy XV semblait sonner le glas d’une série ayant pourtant bercé certains depuis trente ans. Voici, manette en main, mes impressions sur un titre ayant une vision alléchante à offrir et une accumulation de problèmes à résoudre.
Phantasme d’un Nomura méprisant le tour par tour et obsédé par le cuir et les fermetures éclairs, récupéré par un Tabata ayant su réaliser quelques spin-off originaux et semblant aussi perdu que son produit, Final Fantasy XV était un projet obscur. Derrière le Boys Band, un monde nous ouvrait les bras, rempli de mastodontes, de cités atypiques et de PNJ dans le besoin ; porté par des combats en temps réel et une histoire tragique. Final Fantasy peinait même à ressembler à sa propre ombre : imposante et étouffante, celle-ci semblait condamner un projet trop ambitieux dans un pays où les consoles sont désormais parents pauvres des smartphones.
Si pour la première fois en dix ans j’ai cru apercevoir l’expérience de jeu que Square désire offrir, reste que Final Fantasy XV propose aussi son lot de choses étranges. Tout d’abord, le jeu s’ouvre sur ce qui semble être sa fin. Si le flashback intervient rapidement et que je n’aime guère faire des théories sur une trame que nous ne connaissons que peu, ce choix ne semble pas justifié tant le passage se veut cryptique et peu interactif. Nous incarnons Noctis, prince héritier de Lucis, en route avec ses compagnons pour le futur mariage princier. Manque de chance, la berline de nos quatre compères rend l’âme. L’occasion d’effectuer quelques tâches assez basiques pour obtenir de Cid, mécanicienne à la tenue peu adaptée, les clés de notre véhicule.
Noire, imposante, sponsorisée par Audi… C’est peu dire que de trouver cette mise en avant malhabile, seul moyen de déplacement (plus ou moins) rapide dans l’open world, centre même de celui-ci, justifiant la présence de stations-services et autres drive-in au bord de routes presque désertes. Le véhicule est avant tout un prétexte, un moyen de transformer un simple voyage en road trip paisible et contemplatif. Il faut avouer que si votre regard ne se promène pas négligemment sur les décors et autres landmark accessibles, la conduite deviendra vite redondante tant elle est assistée, votre seule influence tangible étant l’accélération ou la décélération, ainsi que bien sûr d’ordonner au jeu de se garer si vous souhaitez descendre.
J-RPG et simulation sportive partageant peu de gènes communs, intéressons-nous plutôt aux dialogues. Doublés comme le veut la coutume, ceux-ci nous proposent des choix, et un timer nous obligeant à ne pas trop traîner. Final Fantasy XV, restant fidèle à sa licence, n’est pas un jeu construit autour de l'influence du joueur, et pourtant derrière cette simple feature – ainsi que derrière les quelques conséquences que j’ai pu observer – peuvent se deviner quelques promesses d’interactions plus grandes et cohérentes avec l’univers du jeu. Quant aux premières quêtes, elles font office de tutoriel, et s’il ne sera question que d’y tuer des monstres, elles permettent de s’intéresser aux combats.
Ceux-ci ne sont pas, en l’état, caractérisés par leur difficulté. Le système se veut dynamique et visuellement pêchu, mais peine à être fluide. Derrière des contrôles simplistes se cache un sens du timing à maîtriser parfaitement. Le système de combat de cet opus est avant tout basé sur l’esquive des attaques ennemies – au point que Noctis puisse se réfugier en hauteur pour régénérer sa vie –, il faut déstabiliser nos adversaires pour ensuite essayer d’en profiter un maximum. Les compagnons peuvent ici vous aider puisqu’une combinaison de touches suffit à leur demander d’exécuter certaines attaques spéciales. Problème : la caméra. Celle-ci est totalement manuelle, ce qui peut être dérangeant, surtout qu’elle ne semble pas savoir choisir entre plan aguicheur et lisibilité ; ainsi par exemple quand vous donnez des ordres à vos hommes, celle-ci restera quelques secondes sur eux pour que vous puissiez admirer les patterns et que vous retrouviez un Noctis épuisé puisque exposé aux attaques adverses durant ce laps de temps.
Final Fantasy XV fut un rêve, il doit désormais devenir réalité, il doit convaincre le public que l'attente ne fut pas vaine et le plus dur est peut-être de se faire pardonner auprès des joueurs pour des défauts qui sont, aujourd'hui, nécessaires, qui sont l'écueil d'un développement s'étant trop étendu et qui ne peuvent plus être changés aujourd'hui sous peine de reporter ad nauseam la sortie. Le même constat peut être fait sur l'aspect technique à la rue ; vous souvenez-vous de la vidéo, ultra-cut, d'une cinquantaine de minutes issue de cette même démo ? Si oui, sachez qu'elle tournait probablement sur un PC à la puissance démesurée. En effet, cette session de jeu fut l'occasion de constater de nombreux problèmes, du framerate au clipping mal réglé, en passant par des textures n’arrivant pas à s’afficher à temps et par un aliasing, notamment au niveau des cheveux, qui ferait pâlir d’envie Tidus. Tout cela est la preuve, s’il en fallait une, que la route vers l’optimisation de FFXV est encore à parcourir.
Final Fantasy XV est un jeu stigmatisé par ses propres créateurs, mélange d'envies, de mauvaises idées et de rêveries , et tel Icare le jeu pourrait se brûler les ailes avant d'aller rejoindre les rangs des arlésiennes ratées. Le jeu souffre de nombreux défauts : lisibilité à la rue, interface qui n'est ni léchée ni moderne, des personnages peu charismatiques (au premier abord tout du moins), et même un scénario et un setting qui peuvent facilement décevoir. Et pourtant, il est porteur d'une vision, d'une prise de risque presque étonnante venant d'une vielle licence nippone, et si le titre sera probablement gangréné de bugs et d'erreurs absurdes de design, il est probable que le jeu mérite tout de même ses lettres de noblesse, grâce notamment à son monde ouvert. De toutes les rêveries de joueur, un bon Final Fantasy en monde ouvert était l'une des plus improbables. Ici, l'exploration n'est pas seulement prétexte aux combats et semble remplie de lieux à découvrir, de quêtes à accomplir et même de systèmes de jeu qui apporteront peut-être une vraie profondeur au titre.

Final Fantasy XV nous promet un monde, un univers, peut-être plus brut et moins manichéen, de nombreux PNJ et quêtes ainsi qu'une masse de systèmes de jeu qu'il m'a été impossible de découvrir en si peu de temps. Ce que je sais en revanche, c'est que pour la première fois depuis presque cinq ans, j'ai envie d'y croire. Et c'est peut-être là l'essentiel : laisser planer le doute jusqu'à sa sortie – en novembre si tout va bien.
Commentaires (22)




Merci pour la célérité +10.

Message édité pour la dernière fois le : 20/08/2016 à 11:09

Quand aux interviews/Q&A, si il y en avait. Mais nous avons choisi d'annuler (avant même la Gamescom) ce rendez-vous là pour avoir le temps d'y jouer justement et de voir des jeux moins couverts médiatiquement.

Ca n'a pas l'air réussi pour ces deux points.
Dans la vidéo d'une heure, on peut déjà se faire une première idée de la mauvaise qualité de l'écriture.
Des tombes d'anciens rois, mais on a "oublié" où elles se trouvent. C'est quoi cette blague ? Ils sont devenus amnésiques ? Ils ont hiberné pendant 1000 ans ?
Avec leur niveau de technologie, y'en a pas un qui a pensé à les noter sur une carte ? On n'est pas à l'époque des Pharaons.
C'est quand même des tombes royales, mince.
Et pour celles connues, elles sont dans des zones "dangereuses". Comme par hasard. Encore un gros cliché dans la face.
En gros, quand un roi meurt, on l'enterre au pif dans la nature et on l'oublie. Même la famille ne s'en préoccupe pas s'il y a des monstres dans le coin, bah, il repose "en paix", osef.
Après, comme d'hab', y'a des gros méchants qui prennent le contrôle, mais c'est pas grave. On a le temps de pêcher et de faire des courses de Chocobo. C'est pas comme si le prince en avait quelque chose à faire de ses sujets...
Et je ne parle pas de l'apparence de la fille dans le garage à Hammerhead. Tu la poses sur un trottoir la nuit, c'est pareil. C'est tout ce qu'ils ont trouvé pour faire venir les
Sans parler du bordel de faire un système de combat aussi complexe (coups spéciaux, combos, coéquipiers à gérer) qui est adapté au tour par tour pour en faire un jeu en temps réel.
Qui va vraiment gérer tout ça plutôt que spammer "attaque" ? C'est pas fait pour pour être joué en temps réel. Tout seul, y'a déjà de quoi faire, mais gérer en plus 3 autres gugusses, c'est n'importe quoi.
C'est dommage, ça a parfois de la gueule mais si l'enrobage est meilleur que le jeu à proprement parler, ça rassure pas.


Evidemment il faut aussi qu'il y ai une envie du côté de l'éditeur/développeur et qu'ils arrivent à se renouveler.
On pourrait prendre comme exemple CDPR avec The Witcher, ça parle de dernier jeu puis finalement ils ne veulent pas non plus abandonner l'univers en lui-même. Peut-être que le prochain jeu ne sera pas sur Geralt, mais la franchise ne sera pas abandonné. Juste que la prochaine priorité en AAA c'est Cyberpunk 2077.
Mass Effect, on croyait que c'était finit avec le 3.. eh non désolé on vous sort Andromeda.
Bref, ça résume à mon avis à la fois une recherche financière et de plaisir. Chacun ira de son motif (éditeur/développeur/joueur).


Genre Kotor 2, Phantom Pain, Duke Nukem Forever... Je les aime beaucoup, donc ce FF XV il m'attire une grande sympathie de base, ça a l'air d'être un jeu beaucoup trop ambitieux, un véritable univers à portée de mimine et ça me plaît.
Après si le jeu est daubé, je le défoncerai en place public et le pendrai avec les tripailles à l'air, mais pour l'instant de ce que j'ai joué et vu... bah ça me donne envie.

Il peut arriver qu'un univers soit repris sur quelques opus, comme Ivalice , mais chaque FF est "nouveau" en soi.
Le gameplay change également d'un opus à l'autre, et avec toujours plus d'action.
Je regrette quand même les FF au tour par tour.
Le seul personnage qu'on voit dans tous les FF, c'est le père Cid. Un peu le "Tom Bombadil" des FF.

J'ai bien aimé jusqu'au 12. Aprés c'est partie en coui*** avec trop d'action pour moi.
Le 15, faudrait vraiment qu'il soit pas cher, sur PC, et bien optimisé pour que je mette la main dessus ..Autant dire c'est pas gagné..

J'ai bien aimé jusqu'au 12. Aprés c'est partie en coui*** avec trop d'action pour moi.
j'ai beaucoup aimé le VII (mon premier et ma référence) et le VIII (avec son jeu de cartes). Moins l'univers du 9.
Le X m'avait beaucoup plu (avec le blitzball).
Ensuite, j'ai joué avec moins d'enthousiasme mais j'ai tout de même fait le XII mais en trouvant ça un peu redondant... je me suis malgré tout laissé tenter par le XIII pour voir ce que ça donnait sur PS3 mais que c'était ennuyant.
Bref, je me suis dit qu'on ne m'y reprendrait plus. Et pourtant, cette preview peut potentiellement laisser planer le doute. Je ne suis pas encore convaincu mais je serai curieux de lire votre test.
Message édité pour la dernière fois le : 21/08/2016 à 17:24

Donc ils ont toujours pas améliorés la caméra lors des combats, c'était déjà une horreur à l'époque sur la démo. Si avec le laps de temps qui s'est écoulé depuis ils ont toujours pas changés ça, j'ai peu d'espoir qu'ils corrigent le reste.
Il l'ont amélioré depuis Duscae mais ce n'est toujours pas ça.
Dans la vidéo d'une heure, on peut déjà se faire une première idée de la mauvaise qualité de l'écriture.
Je pense que c'est encore un peu tôt pour affirmer ça, la vidéo d'une heure diffusé au est ultra-cut et ne montre finalement pas grand chose de l'intrigue principale (ou grand chose tout court vu le montage assez mauvais).
Et c'est pareil pour le jeu dans sa globalité. Je pense, ou en tout cas j'espère, qu'il y aura du bon. Mais, en attendant de pouvoir juger sur pièce, c'est un projet qui est en effet casse gueule et qu'il vaudrait mieux éviter d'acheter avant que les tests tombent.
Message édité pour la dernière fois le : 22/08/2016 à 12:39

Le jeu ne sera pas parfait, c'est certain, mais il aura néanmoins des qualités, c'est évident, la question étant donc : ces qualités seront-elles suffisamment importantes pour compenser les errances qu'un développement aussi houleux à pu laisser derrière lui ?
Espérons que cet opus laissera, malgré ces défauts, une bonne image et un bon souvenir dans la mémoire des joueurs !



Je me souviens du tout premier trailer de ce FF, quand il s'appelait encore versus XIII et j'avais été totalement conquis... Le temps à fait son oeuvre et diablerie ce jeu ne ressemble plus à grand chose... En même temps au bout de 10ans...
Je suis pourtant un grand fan des FF (enfin du VI, VIII, IX et XII) mais ce jeu m'indiffère royalement. Je ne supporte pas le design des héros, l'univers me fait ni chaud ni froid et le système de combats à l'air tellement foutraque que personne ne semble le maîtriser réellement (merci la caméra).
Pourtant Square et son copain Enix avait trouvé un système en béton avec les gambits de FF XII et même le système du XIII était plutôt sympa

J'aimerais être agréablement surpris mais j'en doute fort ! Et ça me rend (un peu) triste parce que c'est un FF.
Courage Noctis au pire tu iras pleurer chez ton coiffeur, qui est en partie responsable du désamour qu'on te porte


J'espère que quelqu'un ne l'avais pas déjà dit. J'avoue avoir survolé certains commentaires.
